NOUVELLE MUSIQUE POUR LA PARTITION DE LOUIS RIEL COMMANDÉE PAR LE CENTRE NATIONAL DES ARTS ET LA COMPAGNIE D’OPÉRA CANADIENNE

OTTAWA, 6 juin 2019 Le Centre national des Arts est fier de s’associer à la Compagnie d’opéra canadienne dans une commande de nouvelle musique pour remplacer l’aria « Kuyas » qui figure au début du troisième acte de Louis Riel, du compositeur Harry Somers et librettiste Mavor Moore. C’est le compositeur métis et canadien-français Ian Cusson qui a reçu la commande de créer ce nouveau morceau pour l’opéra, monté pour la dernière fois à la COC et au CNA en 2017.

 

Cette décision vise à réparer les torts causés par l’utilisation abusive d’un chant nisga’a dans l’opéra Louis Riel. Elle est le fruit d’un processus de consultation lancé et mené par le professeur de descendance stó:lō Dylan Robinson, auquel ont participé le gouvernement Nisga’a Lisims, des artistes métis et nisga’a, la famille Moore, la COC, le CNA ainsi que des représentants du Musée canadien de l’histoire et d’autres organisations artistiques.

 

« Le Centre national des Arts est honoré de travailler avec la Compagnie d’opéra canadienne et le brillant compositeur Ian Cusson pour créer un nouveau morceau qui constituera un acte de réparation », a dit le président et chef de la direction du CNA, Christopher Deacon. « Ce nouveau morceau, tout en étant fidèle aux intentions du grand opéra de Harry Somers et Mavor Moore, sera une occasion de poursuivre le dialogue et la coopération avec le peuple nisga’a. »

 

Selon le directeur général de la COC, Alexander Neef, « notre objectif en commandant cette révision à la partition de Louis Riel est d’honorer et reconnaître le processus d’apprentissage et d’échange par lequel nous grandissons en tant que culture et en tant que communauté. L’opéra est une forme d’art vivante qui évolue à travers une interprétation et un dialogue continus; nous sommes fiers d’appuyer ce processus créatif alors que nous repensons le rôle et la pertinence de l’opéra aujourd’hui et que nous traçons sa voie vers l’avenir. »

 

L’aria « Kuyas » est basé sur un chant de deuil nisga’a, le « chant de Skateen », qui fut enregistré par Marius Barbeau et transcrit par Sir Ernest MacMillan sur la rivière Nass en 1927. Le « chant de Skateen » est une des centaines de chansons des Premières Nations recueillies par les ethnographes au début du XXe siècle, partagées dans le but de les préserver pour les générations futures. Les Premières Nations ignoraient que ces chansons pourraient un jour être utilisées dans des compositions contemporaines sans leur consentement. L’utilisation que faisait Somers de la chanson dans sa partition de 1967 pour Louis Riel allait également à l’encontre du protocole nisga’a, qui stipule que de tels chants ne peuvent être entonnés que par ceux qui détiennent les droits héréditaires de les interpréter. Pour les Nisga’a, chanter des chants de deuil hors contexte constitue une infraction aux lois traditionnelles et peut avoir un impact spirituel négatif sur la vie des interprètes et de ceux qui les écoutent.

 

Le professeur Dylan Robinson est un universitaire de descendance Stó:lō et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les arts autochtones de l’Université Queen’s. En février 2017, Robinson, G̱oothl Ts'imilx Mike Dangeli (Nisg̱a’a, Chef des Git Hayetsk Dancers), et Wal'aks Keane Tait (Nisg̱a’a, Chef des Kwhlii Gibaygum Nisg̱a'a Dancers) ont approché la COC et le CNA pour demander un dialogue autour des réparations. Au cours des deux années suivantes, Robinson a travaillé étroitement avec les deux organismes pour éduquer toutes les parties impliquées au sujet du mauvais usage historique de la musique autochtone, et a agi comme facilitateur lors de deux rencontres à Toronto et Ottawa pour discuter de la façon appropriée de procéder. 

 

La COC et le CNA se sont engagés à continuer de travailler avec le gouvernement Nisga’a Lisims pour explorer d’autres possibilités d’action et paver le long chemin de la réparation par des gestes réfléchis et éloquents.

 

« Je tiens à remercier la COC et le CNA d’avoir appuyé la demande du Conseil des aînés Nisg̱a’a Lisims de retirer le lim’ooy̓ de Louis Riel, et d’avoir retenu les services du compositeur métis Ian Cusson pour réécrire cette section de l’opéra, » affirme Robinson. « Ceci crée un précédent important pour les nombreuses autres chansons autochtones qui se retrouvent toujours dans des compositions et des arrangements contemporains. Plusieurs chansons autochtones sont des formes de lois, de remèdes, d’enseignements, d’histoires familiales personnelles, et elles possèdent une vie qui leur est propre. Ceci veut dire que leur détournement ne représente pas que de l’appropriation; pour les peuples autochtones, entendre un des aspects les plus chers de leur culture se faire démanteler est souvent une expérience traumatisante. »

 

Les successions de Harry Somers et Mavor Moore remercient le professeur Robinson, G̱oothl Ts'imilx Mike Dangeli et Wal'aks Keane Tait d’avoir lancé la discussion et facilité les échanges avec les nisga’a au sujet de l’utilisation de cette musique. Les deux successions sont aussi très reconnaissantes envers la COC et le CNA d’avoir commandé cette nouvelle œuvre, et à Ian Cusson d’avoir accepté cette commande.

 

Ian Cusson indique que la nouvelle musique au début du troisième acte accompagnera le texte original que Moore avait écrit pour la scène, et qui n’avait pas été utilisé à l’époque. « J’ai l’intention de créer de la musique qui demeure fidèle, sur le plan dramatique, aux intentions des créateurs de l’opéra,  affirme-t-il.  Je suis tellement reconnaissant de faire partie de ce travail important et historique de rendre cette chanson au peuple nisg̱a’a. Le fait que la COC et le CNA, deux des plus grands organismes artistiques au Canada, s’associent aux familles Moore et Somers pour ce geste de rapatriement important témoigne de leur désir d’approfondir leurs liens avec les peuples autochtones. »

 

Ian Cusson est compositeur de mélodies, d’opéras et de musique pour orchestre. Son œuvre explore le vécu des Autochtones du Canada en incorporant l’histoire des Métis, la nature hybride de l’identité raciale mixte et le croisement des cultures occidentale et autochtone. Cusson complète présentement la résidence pour compositeurs Carrefour, un programme de perfectionnement professionnel de deux ans du CNA, avant d’entamer son mandat comme compositeur en résidence pour la COC en août 2019. 

 

La nouvelle création sera présentée pour la première fois lors d’un concert célébrant les œuvres de plusieurs des plus grands compositeurs autochtones au Canada le 19 septembre 2019 au CNA à Ottawa, avec l’orchestre du CNA et son directeur musical Alexander Shelley.

 

PARTNENAIRES

La programmation autochtone au Centre national des Arts est rendue possible grâce au soutien du partenaire principal Groupe Banque TD et du Slaight Family Foundation Indigenous Fund.

 

À PROPOS D’ALEXANDER SHELLEY ET DE L’ORCHESTRE DU CNA


Le chef britannique Alexander Shelley est directeur musical de l’Orchestre du Centre national des Arts et premier chef associé du Royal Philharmonic Orchestra; il a été en outre le premier chef de l’Orchestre symphonique de Nuremberg de 2009 à 2017. Très sollicité à l’échelle mondiale, M. Shelley a été proclamé à l’unanimité gagnant de l’édition 2005 du Concours de direction d’orchestre de Leeds. Il a dirigé, entre autres, l’Orchestre philharmonique de Rotterdam, DSO Berlin, le Leipzig Gewandhaus et l’Orchestre philharmonique de Stockholm, et entretient des liens avec le Deutsche Kammerphilharmonie et l’Orchestre national des jeunes d’Allemagne. À l’opéra, il a notamment dirigé La Veuve joyeuse (Opéra royal du Danemark); Les Noces de Figaro (Opera North); Così fan tutte (Montpellier); et Louis Riel d’Harry Somers (CNA). Alexander Shelley a fait paraître plusieurs enregistrements sous étiquette Deutsche Grammophon et Analekta, la compagnie montréalaise dont il a enrichi le répertoire, avec l’Orchestre du CNA, de pièces comme Réflexions sur la vie et RENCONTR3S, Nouveaux Mondes et Aux frontières de nos rêves, mettant en valeur des œuvres marquantes d’artistes canadiens.

Créé en 1969, l’Orchestre du Centre national des Arts du Canada réunit des musiciens classiques de calibre mondial d’un bout à l’autre du pays et d’ailleurs. Placé sous la conduite inspirée du directeur musical Alexander Shelley, l’ensemble donne plus de 100 concerts par année à Ottawa, ainsi qu’ailleurs au Canada et dans le monde avec le concours de prestigieux solistes comme Itzhak Perlman, Renée Fleming, James Ehnes, Emanuel Ax et Yo-Yo Ma. L’Orchestre se signale par la passion et la clarté de ses interprétations sur scène comme sur disque, par ses programmes innovateurs d’enseignement et de médiation artistique, et par son apport à l’expression de la créativité canadienne. Depuis sa création, l’Orchestre a commandé plus de 80 œuvres, principalement à des compositeurs canadiens, et a été couronné de plusieurs prix, dont le prix JUNO de la Nouvelle composition de l’année en 2018 et 2019.  L’Orchestre du CNA atteint un vaste public à la faveur de ses enregistrements, de ses nombreux programmes éducatifs offerts aux quatre coins du pays et au-delà, et de ses tournées nationales et internationales, dont les plus récentes en Chine, au Royaume-Uni, partout au Canada et en Europe.


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